En musique, les sens s’éveillent…

Troisième et dernière séance « musique » avec Hélène, aujourd’hui mercredi 27 mars! Déjà.

Grand calme parmi cette ronde assise par terre, binômes réunis comme à l’habitude. Et c’est étonnant : ils suivent Hélène du regard, attendant les consignes. Les enfants chantent, jouent avec les instruments entre leurs mains. On est loin du solfège, c’est vrai, notre orchestre bafouille quelque peu et nous sommes loin de sortir notre premier CD mais ici on est dans le ressenti. On tape, on agite, on secoue et des bruits s’échappent plus ou moins harmonieux, le corps de ces jeunes artistes est en éveil : les oreilles écoutent et analysent, les mains testent différents mouvements sur ces instruments bizarres que ramènent Hélène, les doigts serrent, grattent, pincent, les yeux sont perdus ailleurs, comme concentrés sur les notes produites par le groupe.

30 mars 2016 Musique 27

Nouveauté : Hélène a porté du riz ! Binôme après binôme, le riz participe à la fabrication « artisanale » de maracas. Beaucoup de riz pour certains gourmands, bien moins pour d’autres plus mesurés, les maracas font l’objet d’une personnalisation. Tous les enfants décorent leur maracas à grand renfort de feutres et de créativité.

Ce diaporama nécessite JavaScript.

Le temps suspend son vol.

Ces coccinelles et abeilles réunies dans cette ronde se ressemblent. Ils se regardent, se parlent, communiquent avec les yeux, le corps, échangent des avis sur leurs instruments de musique et sur autre chose, des secrets d’enfants que les parents n’entendent pas. Les familles sont assises derrière, elles discutent, elles observent étonnées ces enfants patients, sages, enthousiastes durant toute une heure. Seule ponctuation : le verre de jus de fruit vers lequel tous les enfants courent. Puis ils reviennent s’asseoir avec leur binôme pour une expérience inédite : faire chanter une poche de plastique jaune. Les enfants non autistes guident les enfants autistes dans certains mouvements proposés par Hélène, tous ferment les yeux (un peu, beaucoup, passionnément…) et écoutent ce bout de plastique frotté, caressé, tourmenté par leurs mains. C’est bien vrai qu’une poche de plastique s’exprime ! Elle ne ressemble pas aux autres instruments de musique mais elle parle aux enfants et leur communique sa musicalité !

Ce diaporama nécessite JavaScript.

Puis Hélène raconte une histoire et les enfants ont pour mission de la ponctuer de bruits musicaux. Encore un joli temps de concentration collective.

Ce diaporama nécessite JavaScript.

Le temps est passé très vite et nous avons abandonné l’idée de clôturer par une séance pictos. Les enfants aiment beaucoup poser ces vignettes qui présentent l’activité du jour et les abeilles apprécient de communiquer ainsi avec les coccinelles mais chaque chose en son temps. Les enfants ont besoin de courir, de jouer librement. Nous reportons les pictos à un autre moment.

C’est le moment de la séparation et nous avons adopté un protocole de départ afin de maintenir des repères très importants pour Camille : à la fin de l’activité, tout le monde doit partir, en même temps car c’est la fin pour tout le monde. Pas question que certains mettent les manteaux et pas d’autres, pas question que la règle ne s’applique pas à tout le monde. C’est un repère stabilisant pour Camille qui vit mieux cette séparation, c’est aussi un repère stabilisant pour tout le monde car les enfants (qu’ils soient autistes ou pas) ne comprennent pas toujours la parole des adultes qui déclarent que c’est fini mais qui poursuivent leurs discussions malgré tout durant de très longues minutes…

Il est vrai qu’une heure trente c’est peu. Ces discussions informelles du mercredi permettent de mieux comprendre le quotidien des enfants autistes, et les parents ont beaucoup de choses à partager. Au fil de ces rencontres, la brume se dissipe et les parents abeilles osent plus de questions aux parents coccinelles, affinent leur besoin de comprendre, s’intéressent autrement. Ils sont prêts à passer à une autre étape : nous leur proposerons dès la prochaine rencontre des discussions plus ciblées…

L’œil de la caméra a suivi Lucas et Jérémy tout au long de la séance aujourd’hui et Lucas se trouve maintenant interviewé par Laurent et Sandra, car nous n’oublions pas l’autre but de ces rencontres : expliquer l’autisme et montrer que le vivre ensemble est largement possible en diffusant par le biais d’une Web série saison 2 le regard des enfants non autistes sur les enfants autistes.

La voix de Lucas est tranquille, il parle de Jérémy et des rencontres entre les abeilles et les coccinelles, des séances, de ses ressentis, de communication… Difficile pour un enfant de verbaliser ainsi sa pensée, de prendre conscience de cette pensée et d’accepter de la confier. Pilar, sa maman, dit que Lucas parle peu de ses ressentis en général. Elle est étonnée et fière de voir son fils devant une caméra, interviewé et assumant toutes ses réponses. Il est bavard, il est beau et Jérémy à ses côtés est magnifique. Très présent, il sait qu’on parle de lui, il regarde par la baie vitrée, il semble s’agiter parfois comme pour dire quelque chose lui-aussi. Mais les mots restent bloqués et ne trouvent pas de sortie alors il s’approche de la caméra et Laurent comprend que Jérémy veut filmer. Pendant quelques minutes, Jérémy est le caméraman, il contrôle la situation. Il est heureux et fier de lui et notre binôme se sépare sous l’œil attendri de Laurent et de Sandra qui ne connaissaient rien à l’autisme ou si peu et qui peu à peu « tombent dedans » et ont envie eux aussi de comprendre pourquoi les enfants autistes font peur, pourquoi ils sont mis à l’écart des crèches, de l’école, pourquoi les parents doivent mener tant de combats pour prouver que leurs enfants sont comme les autres enfants, ont les mêmes droits et qu’il nous faut accepter et respecter leur différence. Avec un encadrement formé, sensibilisé et sensible, l’inclusion est une évidence.

Cet article a été publié dans Non classé. Ajoutez ce permalien à vos favoris.

Laisser un commentaire